S’occuper de ses crypto-actifs de son vivant est déjà un casse-tête. Entre la peur du vol, les risques de hacking ou les menaces de kidnapping, la prudence est une nécessité. Mais que seront nos crypto-actifs après notre mort ? Cette question, encore taboue dans l’univers Web3, revient sur la table avec la dernière initiative de Binance. Elle soulève une problématique aussi universelle qu’inconfortable : comment transmettre ce qu’on a tant protégé sans en perdre la trace pour nos descendants ?
Chaque année, plus d’un milliard de dollars en crypto disparaissent à cause de décès non anticipés. Le chiffre fait froid dans le dos. À la différence de l’argent classique, impossible de contacter un banquier ou de fournir un certificat de décès pour débloquer un wallet crypto. Sans clé privée, vos actifs numériques deviennent des souvenirs inaccessibles pour vos familles.
Dans un post publié sur son compte X, le fondateur de Binance Changpeng Zhao, résume l’urgence : « Les gens évitent ce sujet, mais les humains ne sont pas éternels. Chaque plateforme devrait proposer une fonction testamentaire. »
L’idée est de permettre aux utilisateurs de désigner des comptes bénéficiaires avec une répartition définie à l’avance.
Cette fonctionnalité, Binance l’a lancée le 12 juin 2025. Elle permet de signaler un contact d’urgence après une inactivité prolongée, ouvrant la voie à une demande d’héritage.
Ce que propose le fondateur de Binance va au-delà d’une simple fonctionnalité technique. Il esquisse une nouvelle norme, où la mort n’est plus un trou noir, mais un point de passage. En intégrant une « will function », les plateformes ne répondent pas seulement à une nécessité morale : elles instaurent une forme de continuité, presque patrimoniale, dans un écosystème réputé pour sa forte volatilité.
Les banques libèrent rarement les actifs des défunts. Savoir que nos valeurs peuvent être transmises renforce encore la confiance.
En parallèle, Changpeng Zhao Z suggère d’ouvrir les comptes aux mineurs, pour qu’ils puissent être bénéficiaires sans pour autant trader. Une mesure qui reste à encadrer mais qui ouvre largement le débat.
Mais cette volonté se heurte à des réalités juridiques encore floues. Aux États-Unis, les crypto-actifs sont considérés comme des biens personnels, comparables à des meubles ou des actions. Impossible donc d’appliquer les mécanismes traditionnels des assurances-vie ou des comptes bancaires. En cas de décès sans testament, la loi de succession de l’État s’applique, mais sans la clé privée, l’héritage reste inaccessible.
La solution pourrait être une double démarche : un testament classique accompagné d’instructions techniques, conservées de manière sécurisée. Ne jamais inscrire ses clés dans le testament lui-même, car celui-ci devient public lors du procès de succession.
La mort numérique dépasse le cadre de la richesse financière. La question se pose aujourd’hui : que devient votre « vous » crypto ? Vos followers, vos tokens, vos identifiants liés à des wallets ne sont pas seulement des actifs. Ils sont votre trace, votre empreinte Web3.
Le Web3, par sa conception même, repose sur des liens intransférables. Le « Soulbound Token » est justement fait pour être attaché à une identité unique. Comment hériter de ce qui ne peut être ni divisé, ni cédé ? Le débat est désormais lancé.
Quelques chiffres qui parlent d’eux-mêmes :
- Plus de 1 milliard $ de crypto non réclamés chaque année après des décès imprévus ;
- Moyenne d’âge des détenteurs de crypto : 27 à 42 ans ;
- Binance lance son « will function » le 12 juin 2025 ;
- La crypto est non couverte par les mécanismes bancaires traditionnels en matière d’héritage.
Préparer le transfert de bitcoins et de cryptos est un enjeu réel. Des réflexions existent depuis plusieurs années, notamment sur le transfert de bitcoins après la mort. Des pistes techniques et juridiques ont été avancées. Mais rien ne remplacera une prise de conscience collective.
Et vous, comment planifiez-vous le transfert de vos différents comptes à votre progéniture au soir de votre vie ? Le sujet vous concerne tous !
